Rocafonda, un quartier qui bat le football
C’est dans le quartier de Rocafonda, à Mataró, qu’ont été conçus les premiers gestes de Lamine Yamal. Ses rues respirent le football, avec des enfants qui improvisent des matchs sur des terrains en béton. On y trouve des maillots des équipes nationales du Real Madrid, du Maroc et de l’Argentine, mais c’est la figure de Lamine Yamal qui a donné à ce coin de la ville sa propre identité. Sa célébration avec le numéro 304, en référence au code postal du quartier, est un clin d’œil constant à ces racines qu’il n’oublie pas.
Rocafonda est un quartier modeste, avec un fort caractère immigré et une communauté qui cherche à aller de l’avant. Le cas de Lamine Yamal est devenu un symbole d’espoir, montrant que des histoires capables de changer les destins peuvent aussi émerger d’un environnement difficile.
Une famille marquée par la grand-mère Fatima
À l’origine de cette trajectoire se trouve Fatima, la grand-mère paternelle, une femme qui a quitté Tanger il y a plus de trois décennies pour commencer une nouvelle vie en Catalogne. Avec beaucoup d’efforts, elle a régularisé sa situation, a travaillé dans une résidence et a réussi à faire venir ses fils et ses filles en Espagne. Aujourd’hui retraitée, elle est considérée comme le grand pilier de la famille, la racine d’une lignée qui a trouvé sa stabilité à Mataró.
La vie dans cet appartement partagé entre les parents, la grand-mère et les oncles était loin d’être confortable. Jusqu’à neuf personnes vivaient ensemble au premier étage. Cependant, l’union familiale est devenue une forteresse, toujours unie par le football de Lamine, qui remplit chaque membre d’espoir.
L’influence des parents
Le père, Mounir Nasraoui, est arrivé à Barcelone alors qu’il était enfant. Ses sympathies initiales étaient plus proches du Real Madrid que du Barça, mais il s’est rapidement attaché à soutenir le talent de son fils. Son caractère, fort dans le passé, s’est équilibré avec le temps et la fierté de voir Lamine grandir à La Masia.
Sa mère, Sheila Ebana, née en Guinée équatoriale, a joué un rôle décisif dans les premiers pas du jeune footballeur. Travaillant dans la restauration, elle réussit à s’installer à Granollers, où elle inscrit son fils au CF La Torreta. Là, Lamine prend plaisir à jouer au football et commence à faire preuve d’un talent précoce. Sheila l’accompagnait toujours, allant le chercher à l’entraînement et l’emmenant manger des churros dans le centre de Granollers, une routine simple qui a renforcé le lien entre la mère et le fils.
La découverte de La Torreta
Le CF La Torreta a été la première maison du football de Lamine Yamal. Entre 2009 et 2014, c’est là qu’il s’est forgé en tant que joueur, sous l’œil attentif d’entraîneurs qui ont su déceler son potentiel. L’Espanyol a tenté de le recruter, et des propositions sont même parvenues à sa famille, mais en 2014, le FC Barcelone est passé à l’action. Le recruteur Isidre Gil a alerté le club et le jeune a passé les tests. Depuis, sa vie est définitivement liée au Barça.
Le président et les entraîneurs de La Torreta se souviennent encore de son assurance et de la facilité avec laquelle il décidait des matchs. Son talent, associé à la compétitivité qu’il a acquise en jouant dans la rue contre des adversaires beaucoup plus âgés, a façonné un footballeur unique.
La Masia et le saut dans l’élite
Le Barça a décidé que Lamine Yamal devait rejoindre La Masia après avoir terminé l’école primaire à l’Escola Pereanton de Granollers. Il s’agit d’une étape clé : en plus de grandir en tant que footballeur, il doit vivre dans un environnement qui exige maturité et responsabilité. Il y partage ses expériences avec d’autres jeunes qui rêvent eux aussi d’intégrer l’équipe première, mais peu d’entre eux ont une projection aussi fulgurante.
Sa carrière internationale a également connu des moments intenses. Le Maroc a tenté de l’attirer dans ses rangs, mais Lamine a choisi l’équipe nationale espagnole. Cette décision a été accompagnée de fierté et d’une certaine controverse parmi ses proches, mais le joueur a tenu bon. Aujourd’hui, il est l’une des grandes références de la Roja.
Le poids d’un nom chargé d’histoire
Le nom de Lamine Yamal est une histoire unique. En arabe, il signifie “honnête” et “beauté”, mais son choix était aussi un geste de gratitude. Ses parents, qui connaissaient des difficultés financières, ont été aidés par deux personnes portant le même nom. En guise de promesse, ils ont décidé que s’ils avaient un jour un fils, il porterait leur nom. Le football a fait de ce geste un symbole connu dans le monde entier.
Une famille qui vit fièrement dans le présent
Si son père et plusieurs de ses oncles ont un temps sympathisé avec le Real Madrid, ils ont aujourd’hui tous cédé à la carrière de Lamine Yamal au Barça. La boulangerie familiale de Mataró affiche une fresque à son effigie et arbore les drapeaux de l’Espagne, du Maroc et de la Guinée équatoriale en hommage à ses racines métissées.
Grand-mère Fatima, aujourd’hui à la retraite, vit les jeux avec émotion, tant à Barcelone qu’au Maroc. Elle représente l’origine de tout cela : la femme qui a traversé le détroit à l’âge de 40 ans et a construit une base solide pour que ses enfants et petits-enfants aient un avenir meilleur.
De Rocafonda au ballon d’or
En quelques années, Lamine Yamal est passé des rues de Mataró à une candidature au Ballon d’Or à seulement 17 ans. Après avoir remporté le Championnat d’Europe avec l’Espagne, il a débuté le championnat à un niveau spectaculaire. Ce qui semblait être un rêve lointain est devenu une réalité qui remplit de fierté son quartier, sa famille et tout un pays.
L’histoire de Lamine Yamal montre que les grands talents naissent dans des environnements simples, où la passion, le sacrifice et la solidarité familiale peuvent propulser un jeune au sommet du football mondial.